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Biographies de neurologues
 
Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier 
 
 
 

mise à jour du
25 janvier 2010
Thèse
1857
pages : 14-18
Considérations physiologiques sur l'accès d'épilepsie
Louis Achille François Foville
dit Defoville ou Foville fils
1831 - 1887
 
interne des hôpitaux de Paris en 1853

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Je n'ai pas à exposer ici tout ce qui est relatif au pouvoir excito-moteur ou réflexe. Cette théorie est aujourd'hui connue de tout le monde, et les ouvrages de physiologie la traitent avec tous lest détails qu'elle comporte.
 
louis achille foville
 
Je demanderai seulement à résumer, sous forme de propositions, quelques points applicables à mon sujet.
 
1°) Une excitation émanée d'un point quelconque de l'économie, et transmise par des fibres nerveuse sensitives soit à la moelle épinière, soit à l'encéphale, se réfléchit, par l'entremise de ces centres nerveux, sur des fibres nerveuses motrices, pour donner lieu à des mouvements auxquels la volonté reste complétemeut étrangère.
 
2°) Ces mouvements se manifestent et dans les muscles de la vie animale et dans ceux de la vie organique.
 
3°) L'excitation centripète qui se réfléchit par des mouvements dans l'un ou l'autre de ces ordres de muscles, ou dans l'un et l'autre à la fois, peut elle-même être éprouvée et transmise par des nerfs cérébro-rachidiens ou par des filets du grand sympathique.
 
4°) Ces excitations périphériques suivant qu'elles arrivent ou non jusqu'au siège de la perception des sensations, se transforment ou non en sensations; elles sont donc perçues ou non perçues, senties ou non senties.
 
5°) Ce pouvoir excito-moteur est inhérent en propre à la moelle et complétement indépendant du cerveau et du cervelet; il se manifeste avec plus d'énergie quand la moelle est affranchie de l'influence cérébrale. Diverses substances peuvent le modifier: la strychnine et l'opium l'exaltent; l'éther, selon M. Longet, la jusquiame, d'après Marsball-Hall, le diminue.
 
6°) La réaction motrice a une tendance constante à se faire par les filets moteurs naissant le plus près des racines sensitives qui ont transmis l'excitation.
 
7)) Lorsque l'excitation est plus forte, ou que l'excitabilité est augmentée, la réaction s'étend aux racines motrices sur une plus grande longueur de la moelle, tant au-dessus qu'au-dessous du point d'insertion des filets excités; elle peut même s'étendre à la totalité des racines motrices.
 
Ainsi une excitation locale extrêmement vive, ou bien quand l'excitabilité est fort augmentée, une excitation locale même très légère peut determiner des convulsions générales.
 
8°) L'excitabilité du bulbe et de la moelle allongée se traduit principalenent par des mouvements des muscles respiratoires; elle est mise en jeu surtout par les excitations des muqueuses et des téguments externes. Du reste, les excitations qui portent sur les terminaisons des nerfs ont beaucoup plus d'aptitude à déterminer des mouvements réflexes que celles qui sont appliquées directement à un tronc nerveux.
 
9°) L'excitabilité réflexe s'épuise lorsqu'elle est provoquée un grand nombre de fois de suite. Alors, si de nouvelles excitations sont produites, les réactions musculaires diminuent d'énergie pour cesser bientôt tout à fait. Plus l'excitabilité est exaltée, plus elle s'épuise vite par sa mise en action. C'est ainsi que survient la mort dans l'empoisonnement par la strychnine.
 
10°) L'excitabilité réflexe est, au contraire, entretenue et augmentée lorsqu'on la met en jeu à certains intervalles. Par exemple, deux grenouilles décapitées étant données, si l'une est laissée dans un repos absolu pendant plusieurs jours, et qu'on excite modérénent l'autre à plusieurs reprises chaque jour, au bout de ce temps l'excitabitité réflexe de la seconde sera considérable; il suffira de la toucher légèrement pour causer des convulsions générales; la première au contraire ne jouira que d'une excitabilité très faible des excitations, même violentes, ne détermineront que des mouvements peu étendus.
 
Telles sont les conditions principales de manifestation du pouvoir intrinsèque dela substance grise de la moelle, pouvoir qui la fait agir comme un vrai centre de réflexion motrice en dehors de toute influence cérébrale.
 
Cette puissance intrinsèque propre à la moelle n'est pas mise en jeu seulement par les impressions que lui transmettent les nerfs rachidiens sensitifs ou les filets du grand sympathique. Les nerfs de sensibilité spéciale sont aussi capables de provoquer des mouvements involontaires. C'est ainsi que lorsque l'oeil est menacé, les paupières se ferment; un bruit violent produit le même effet. Certaines odeurs provoquent des manifestations motrices, le vomissement par exemple. Il est vrai que le défaut de relation entre les racines de ces nerfs et la moelle n'est qu'apparent. Aujourd'hui, on incline à reconnaître la continuité entre leurs racines blanches et les faisceaux postérieurs du bulbe prolongés dans l'encéphale.
 
Mais ce ne sont pas seulement les nerfs rachidiens ou autres qui peuvent mettre en jeu cette excitabilité motrice de la moelle; les excitations directes de l'encéphale peuvent le faire.
 
Marshall-Hall a rejeté la possibilité de ce fait, en considérant ces mouvements comme le résultat d'un acte psychique, une manifestation de la volition; mais comme le fait remarquer M. Louget, le bâillement et le vomissement peuvent avoir lieu par cela seul qu'on voit ou qu'on entend bâiller ou vomir quelqu'un; à coup sûr, ce n'est pas, là un acte volontaire. M. Longet raconte que lui-même, après avoir passé plusieurs jours en mer, ne pouvait pas s'empêcher de vomir au souvenir des angoisses qu'il avait endurées. On ne l'accusera pas d'avoir contribué volontairement à renouveler ses tourments.
 
Est-ce par un effet de la volonté qu'une impression purement morale fait jeter un cri, faire un bond ou changer de couleur? Que de fois au contraire de pareils mouvements involontaires trahissent-ils une émotion que l'on voudrait cacher?
 
Tout le monde connaît les effets de la frayeur; les coliques qui affligent les jeunes recrues un premier jour de bataille ne tiennent bien certainement qu'à une impression morale et sont tout à fait involontaires.
 
On voit donc, en résumé, que la moelle épinière et la moelle allongée ont une propriété spéciale qui les rend aptes à déterminer des mouvements, indépendants de la volonté, à la suite d'une excitation qui leur est transmise soit par les fibres sensitives qui s'y insèrent directement, soit par les fibres de sensibilité spéciale ou les fibres de la vie organique qui leur sont médiatement unies, soit enfin par les portions des organes encéphaliques uniquement propres à recueillir des impressions morales et intellectuelles. En un mot, chaque portion sensitive du système nerveux, quelle que soit sa spécialité d'action, qu'elle appartienne à la vie organique ou à la vie animale, est propre à déterminer dans la moelle la modification inconnue dans sa nature à la suite de laquelle les fibres motrices réagissent.
 
Les circonstances où cette propriété est mise en jeu sont extrêmement fréquentes, tous les phénomènes sympathiques sont de ce nombre. On voit aussi par les expériences que cette excitabilité est susceptible d'augmentatlon ou de diminution. C'est à son augmentation qu'est due cette susceptibilité aux impressions qui distingue la plupart des personnes atteintes de maladies nerveuses, et à laquelle on a donné divers noms sans savoir en quoi elle consistait. C'est elle que l'on appelle ordinairement état nerveux, que M. Gendrin désigne sous le nom de mobilité nerveuse, et que beaucoup d'Anglais, entre autres Todd, dénomment polarité nerveuse.
 
C'est de cette excitabilité réflexe de la moelle épinière, et de la moelle allongée en particulier, que me paraissent dépendre les phénomènes convulsifs de l'épilepsie.