mystery of yawning
Le bâillement, du réflexe à la pathologie
Le bâillement : de l'éthologie à la médecine clinique
Le bâillement : phylogenèse, éthologie, nosogénie
 Le bâillement : un comportement universel
La parakinésie brachiale oscitante
Yawning: its cycle, its role
Warum gähnen wir ?
 
Fetal yawning assessed by 3D and 4D sonography
Le bâillement foetal
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Biographies de neurologues
 
Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier 
 
 
 

mise à jour du
19 décembre 2011
Journal of Neurology
Journal of Neurology. 2012;259(6):1255-1256
Charles-Prosper Ollivier d'Angers
1796-1845
O. Walusinski
 
 Les biographies de neurologues

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Charles-Prosper Ollivier d'Angers (1796-1845) est reconnu pour avoir forgé le mot syringomyélie d'après le grec syringo, «creusé en forme de tuyau » et « myélie », au sein de la moelle. Ce mot apparaît dans la deuxième édition, en 1827, de son « Traité des maladies de la moelle épinière contenant l'histoire anatomique, physiologique et pathologique de ce centre nerveux chez l'homme » dont trois éditions, progressivement enrichies, paraîtront de 1823 à 1837. Ollivier fait véritablement oeuvre de pionnier en composant ainsi ce traité consacré exclusivement à la pathologie médullaire.
 
Ollivier naît le 11 octobre 1796 à Angers (Maine et Loire, France). Son père alors épicier, et qui deviendra pharmacien en 1805, le déclara sous le nom de Charles-Prosper à l'état civil et fils légitime. Ce curieux père avait en effet déclaré, trois jours plus tôt, un autre garçon, né hors mariage, qu'il avait nommé Prosper-Charles, qui deviendra pharmacien ! A la fin de ses études au lycée impérial, la carrière militaire paraissait à Ollivier la seule chance de prompts succès, à cette époque glorieuse de l'Empire napoléonien. Admis à l'Ecole Militaire de Saint-Cyr, il en sort sous-lieutenant en 1813 et rejoint les armées de Napoléon, après la déroute devant Moscou, à Mayence. Il participe à la bataille de Hanau le 30 octobre 1813, au cours de laquelle il contracte le typhus. Il arrive malgré cela à continuer la retraite vers la France. Sa carrière militaire se termine lors de l'abdication de Napoléon le 4 avril 1814, Ollivier n'a que 17 ans.
 
ollivier d'angers
Charles-Prosper Ollivier d'Angers
par Guillaume Bodinier 1821
Université d'Angers, collection publique
 
Non sans avoir hésité à s'orienter vers d'autres carrières, il s'inscrit à l'école de médecine d'Angers, y préparant l'officiat de santé. Après avoir été interne dans sa ville natale, il est obligé de gagner Paris, en 1820, afin de soutenir une thèse de doctorat. Il y fréquente l'hôpital de La Charité et l'Hôtel-Dieu, suit l'enseignement de l'Ecole Pratique et sympathise avec deux maîtres, angevins de naissance comme lui, Pierre-Auguste Béclard (1785-1825), professeur d'anatomie et Mathieu-Joseph Orfila (1787-1853), professeur de médecine légale. Béclard lui confie le sujet de sa thèse qu'il soutient le 12 juin 1823 : « Essai sur l'anatomie et les vices de conformation de la moelle épinière chez l'homme » qu'il décrit dans son introduction comme un travail « très incomplet puisque je ne donne ici qu'une très petite partie du sujet que je m'étais proposé de traiter ». Ollivier est couronné d'une médaille d'or pour son travail, délivrée par la Société Royale de Médecine de Marseille. Celle-ci lui ouvre les portes de l'éditeur de la rue de l'Ecole de Médecine, à Paris, A. Crevot qui publie, le 23 octobre 1823, la première édition de son mémoire, plus complet que sa thèse : « De la moelle épinière et ses maladies » devenant pour sa seconde édition « Traité de la moelle épinière et ses maladies » en deux volumes en 1827.
 
Pendant les dix années suivantes, Ollivier va exercer la chirurgie dans un dispensaire de la Société Philanthropique de Paris. Sur recommandations d'Orfila, il est commis de plus en plus souvent en qualité d'expert judiciaire (Bayard H.L. Notice C.P. Ollivier d'Angers. Annales d'hygiène publique et de médecine légale. Paris. Baillière. 1845;34:5-20). En 1826, il devient directeur du journal « Archives de Médecine Légale » et est élu membre de l'Académie Royale de Médecine. Il remplace Béclard, décédé prématurément, comme rédacteur du Dictionnaire de Médecine de Nicolas-Philibert Adelon (1782-1862), y traitant des plaies, des anévrysmes, de la sciatique, de « la pourriture d'hôpital » etc (Adelon N, Béclard PA, Biette L. Dictionnaire de médecine. Paris. Béchet jeune. 1821-1828. 21 vol.). Il contribue au Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne de Jean-Eugène Dezeimeris (1799-1851) (Dezeimeris JE, Ollivier CP, Raige-Delorme J. Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne. Paris. Béchet jeune. 1826-1839. 5 vol.).
 
La Ville de Paris le décore en 1832 pour son dévouement au cours de l'épidémie de choléra qui ravage la capitale après la Provence et la Bourgogne. Homme d'activité débordante, il consacre l'essentiel de son temps, au cours des 15 dernières années de sa vie, à la médecine légale : définition de l'infanticide, appréciation de l'âge gestationnel, degré de culpabilité d'un malade mental (monomanie, actuelle paranoïa), définition des critères cliniques constatant la mort (Morin-Bateau M. Charles-Prosper Ollivier d'Angers (1796-1845): à l'aube de la neurologie moderne. Thèse de doctorat en Médecine. Angers. 1986. 156p.). Initiateur de l'utilisation du microscope en expertise médico-légale, il distingue les poils d'animaux des cheveux humains sur une hache sensée être arme d'un crime (Ollivier d'Anger ChP. Nouvelle application de l'emploi du microscope dans les expertises médico-légales. Archives générales de médecine. Paris. Béchet jeune. Panckoucke. 1838. série "3e et nouvelle série", n° 03. 455-460). A partir de juin 1844, Ollivier se plaint de céphalées continues intolérables, s'aggravant peu à peu, accompagnées de vomissements et d'une baisse progressive de l'acuité visuelle. Il meurt 11 mars 1845 d'une probable hypertension intra-crânienne d'origine tumorale.
 
Description des pathologies médullaires
Ollivier met deux ans à collationner les cas cliniques qui lui permettent de présenter sa thèse. Peu avant, John Abercrombie (1780-1844) avait publié à Edinburgh « Observations on the Diseases of the Spinal Marrow » (The Edinburgh Medical and Surgical Journal, July 1818), mais Ollivier semble l'avoir ignoré et ne le cite jamais. Ollivier explique le peu de données recueillies avant sa thèse: « le petit nombre de faits rapportés par les observateurs le prouve [...] cet organe est un de ceux qui sont le moins souvent affectés. Si mes recherches m'ont conduit ainsi à un résultat en quelque sorte négatif, je crois qu'il concourt à prouver que les affections de la moelle spinale sont peu fréquentes chez l'homme ». Et plus loin : « le plus grand nombre des maladie de la moelle épinière avaient été observées par les anciens (cf Hippocrate et Galien); cette partie de la pathologie est à peu près restée au même point depuis cette époque ».
 
Ollivier commence en proposant une embryologie comparée de la moelle de l'homme et des animaux tout à fait originale puis il passe en revue l'anatomie et l'anatomo-pathologie macroscopique de la moelle. Il décrit des malformations comme le spina-bifida nommés « les vices de conformation », « la respiration de l'hydrorachis » précisant l'effet de l'inspiration et de l'expiration sur les mouvements de la moelle chez des hydrocéphales, une hétérotopie bulbo-cérébelleuse avec méningocèle reconnues 60 ans plus tard comme malformation d'Arnold-Chiari, des atteintes traumatiques, inflammatoires et infectieuses des méninges. Après avoir cité les expériences d'Albrecht von Haller (1708-1777) et de Domenico Cotugno (1736-1822), Ollivier évoque les découvertes de la circulation du liquide cérébro-spinal de son contemporain François Magendie (1783-1855) et avance une fonction : « la couche liquide qui enveloppe la moelle épinière dans l'état normal et physiologique, remplit tous les vides qui pourraient exister entre cet organe et ses membranes ;[...] il contribue beaucoup à amortir les secousses imprimées au rachis, et, qui, sans cela, seraient transmises avec plus de force au centre nerveux qu'il entoure et protège ».
 
ollivier d'angers
 
 
La syringomyélie
 
Dès 1823, il soutient que « l'examen de la structure intérieure de la moelle épinière démontre qu'il n'existe pas dans son centre un canal, comme quelques anatomistes l'ont pensé ». Il ne changera jamais d'opinion. Il est probable que les difficultés techniques de prélèvement et de dissection ne permettant qu'un examen macroscopique de la moelle, plusieurs jours après un décès, sont la cause de cette erreur. Dans le chapitre qu'il consacre à la pathologie, il ajoute: « plusieurs anatomistes ont admis l'existence d'un canal dans le milieu de la moelle épinière [...]. Il est à présumer que ce canal était en quelque sorte une prolongation du quatrième ventricule et qu'il était analogue à celui observé par M. Portal ». Dès 1804, Antoine Portal 1742-1832) écrit en effet: « l'examen de la moelle de divers sujets, a fait voir dans son milieu un canal grêle qui descendait plus ou moins bas, et qui communiquait supérieurement avec le quatrième ventricule; il paroît convenable de penser que ce canal existe naturellement, mais qu'il ne devient bien apparent que par état de maladie, comme les sujets morts de spina bifida » (Portal A. Cours d'anatomie médicale ou élémens de l'anatomie de l'homme avec des remarques physiologiques et pathologiques et les résultats de l'observation sur le siège et la nature des maladies, d'après l'ouverture des corps. Paris. Baudouin. 1804. tome 4. 590p.).
 
Louis Florentin Calmeil (1798-1895) précise, en 1828, que « plusieurs animaux vertébrés (des oiseaux, des reptiles, des poissons) conservent, pendant toute la vie, un canal au centre de la moelle. Quelques anatomistes ont rencontré une disposition semblable chez l'homme adulte. Cette disposition leur a été contestée. J'ai fait de nombreuses dissections tendant à éclairer ce point d'anatomie humaine. Il est certain qu'on rencontre assez souvent, même à un âge avancé, un canal central dans la moelle épinière» (Calmeil LF. Recherches sur la structure, les fonctions et le ramollissement de la mœlle épinière. Extrait du Journal des Progrès des Sciences et Institutions Médicales. Paris. Chez Villeret. 1828. 107p.). Malgré ces observations, Ollivier reprend néanmoins les termes de sa thèse dans son livre de 1827 et de 1837, se contentant de souligner que parmi les observations de Calmeil: « plusieurs sont autant d'exemples d'une variété d'organisation primitive de la moelle épinière, tandis que dans d'autres le canal observé dans la moelle était bien évidemment le produit d'une altération pathologique développée postérieurement à la naissance ». Ainsi, on ne peut reconnaître à Ollivier que la paternité du mot syringomyélie, description purement anatomo-pathologique mal interprétée, et qu'il n'a reconnu aucune symptomatologie liée à « la moelle creusée en forme de tuyau ». Il faudra attendre 1882 et les travaux allemands de Otto Kahler (1849-1893) et Friedrich Schultze (1848-1934) pour que la symptomatologie clinique de la syringomyélie soit associée à la présence d'un syrinx anatomo-pathologique (von Kahler O. Casuistiche Beiträge. Prager Medicinische Wochenschrift 18/10/1882;7(42):413-415 / 01/11/1882;7(44):433-436 / 08/11/1882;7(45):443-445.) (Schultze F. Beiträge zur Pathologie und pathologischen Anatomie des centralen Nervensystems. Ueber Splat-, Höhlen- und Gliombildung im Rückenmarke und in der Medulla oblongata. Archiv für pathologische Anatomie und Physiologie und für klinische Medicin. Berlin. von G. Reimer. 1882. Band 87; Drittes Heft (1 März 1882): 510-540.).
 
Enfin, Jean-Martin Charcot (1825-1893) le citera dans ses leçons sur les lésions de la moelle épinière en 1872, comme ayant probablement décrit deux observations et l'anatomo-pathologie macroscopique de la sclérose en plaques : « paralysie incomplète du mouvement des membres thoraciques puis du tronc et des membres inférieurs ; affaiblissement moins marqué du sentiment. Mort à la suite d'une pneumonie. Ecartement des cordons médullaires postérieurs ; substance grise hypertrophiée et altérée, à nu, à la face postérieure de la moelle » (Observation CXXXIII) et dans un autre cas « induration extrême de toute la moelle » (Observation CXXXII). Ollivier parle de myélite et bien qu'il ne cite pas d'atteinte de la substance blanche, il a le mérite de bâtir les fondations nosologiques des pathologies médullaires que les cliniciens du XIX ° siècle parachèveront, remédiant « au profond oubli dans lequel est tombé la moelle rachidienne » comme il le disait lui-même. (Charcot JM. Leçons sur les maladies du système nerveux faites à La Salpêtrière, recueillies et publiées par Bourneville. Paris. Adrien Delahaye. 1872-1873. 368p.)