mystery of yawning
 
A functional neuroanatomy of tics in Tourette syndrome
E Stern, D Silbersweig
Arch Gene Psychiatry Aug 2000; vol 57; p741-748

mise à jour le
22 avril 2001
 Lexique
les tics par Trousseau en 1868
Tics, maladie de Gilles de la Tourette
Troubles obsessionnels et compulsifs
voir l'épilepsie diencéphalique
A functional neuroanatomy of tics in Tourette Syndrome

Chat-logomini

Faut-il réviser la phénoménologie des tics, des obsessions et des compulsions ?
 
Le tic est-il un mouvement toujours totalement "involontaire et sans but" ? Il faut mentionner que la majorité des patients ayant des tics multiples les disent intentionnels mais irrésistibles et 25% les disent comporter à la fois des composantes volontaires et involontaires. Pour 132 patients ayant un SGT, 92 % disaient qu'ils ressentaient leurs tics comme partiellement ou totalement volontaires. 95% de ces patients ont remarqué une sensation (un avertissement mental ou physique) qu'ils décrivent comme une pression, une sensation une impulsion, un besoin de faire un tic.
 
Les tics sont une réponse totalement ou partiellement "volontaire" à ces "besoins prémonitoires". Ces besoins prémonitoires (premonitory urges) sont plus souvent ressentis comme une expérience physique plutôt que mentale; unilatéraux, bilatéraux et symétriques ou médians, accrus par le stress, l'anxiété, atténués par la relaxation, la concentration, modifiés par les médicaments. Les sensations et besoins prémonitoires peuvent être ressentis comme plus génants que l'exécution des tics et sont soulagés par la réalisation des tics. La prise de conscience de la sensation ou du besoin prémonitoire peut aider à empêcher la survenue des tics. Le besoin prémonitoire avait été dénommé sensory tic par Shapiro. Un médecin, Blick (1980) a décrit sa propre expérience : "chaque mouvement était précédé d'une sensation et correspondait à une capitulation volontaire pour soulager cette sensation".
 
Une forme particulière de compulsion a été observée chez des patients ayant un SGT : 56% des 61 sujets ayant un SGT et des SOC disaient avoir conscience d'un besoin d'exécuter leurs compulsions jusqu'à ce qu'elles soient 'Just right". Cette nécessité concerne des caractéristiques visuelles ou tactiles (plus rarement auditives) de l'acte compulsif ou de ses conséquences. Ces perceptions exactes (just right perceptions) sont différentes des besoins prémonitoires associés aux tics, plus souvent ressenties comme un phénomène mental plutôt que physique.
 
Le besoin de perception exacte précède ou accompagne le début de réalisation de la compulsion. Les perceptions exactes peuvent être localisées sur une image corporelle, unilatérales ou bilatérales et symétriques ou médianes. Elles sont différentes des compulsions toujours recommencées en raison d'un sentiment d'incomplétude ou d'un souci de perfection jamais atteint (psychasthénie). Chez les patients ayant un SGT, les tics comme les compulsions sont fréquemment perçus comme l'intrusion soudaine dans la conscience d'un besoin d'un type ou d'un autre. Bien que ces besoins semblent différents : faire un mouvement, accomplir une tâche spécifique, leurs issues sont similaires, du fait qu'un sentiment de soulagement (satisfaction, accomplissement) est recherché et souvent obtenu, même s'il n'est que transitoire. La phénoménologie des besoins prémonitoires suivis de tics, des perceptions exactes précédant ou accompagnant certaines compulsions chez les tiqueurs comporte des similitudes avec celles des pensées obsessionnelles qui font intrusion dans la conscience et trouvent un soulagement dans l'accomplissement d'un acte mental ou physique.
 
Traditionnellement les obsessions sont mentales et les compulsions sont comportementales. Les compulsions sont des comportements extériorisés, observables, se déroulant selon-certains rituels ou de façon stéréotypée, en réponse à une obsession. Ces comportements ont pour fonction de la neutraliser, ou d'empêcher un sentiment de malaise, un évènement ou une situation redoutée. Il existe aussi des rituels mentaux (arithmomanie, onomatomanie). Ces actes mentaux sont liés aux obsessions (par exemple prières répétées pour lutter contre une pensée blasphématoire) : ils ont pour fonction de les neutraliser, ou de réduire la détresse des obsédés. Actes intériorisés, ils ne sont pas observables. Les compulsions observables sont dites comportementales, les compulsions inobservables sont dites cognitives.
 
Tics, compulsions et obsessions, un continuum phénoménologique ? Les cliniciens connaissent les difficultés de définir correctement les gestes et les pensées qu'ils observent et analysent chez certains patients ayant une MTC ou un TOC. Parfois les rituels du toucher sont utilisés pour déguiser un tic involontaire. D'autres fois la peur d'émettre des mots inacceptables semble obsessionnelle. Il est plus que probable que les compulsions qui ressemblent à des tics et que certains tics moteurs complexes sont à la croisée des chemins du TOC et du SGT et qu'ils continueront à défier nos tentatives de les séparer. L'étude minutieuse des patients ayant une MTC, un TOC, ou une association de ces deux troubles montre l'existence de mouvements, de comportements et de pensées qui semblent intermédiaires entre les tics, les compulsions et les obsessions. Peut-on considérer ces comportements et ces pensées transitionnels comme des repères sur un continuum ? Peut-on admettre l'existence d'un spectre incluant : (1) le tic (moteur ou vocal) simple, involontaire ; (2) le tic (moteur ou vocal) complexe, involontaire ; (3) le tic (simple ou complexe) intentionnel, en réponse à un besoin prémonitoire ; (4) la compulsion avec besoin de perception exacte chez les patients ayant un SGT associé à un TOC ou à des SOC ; (5) la compulsion comportementale non liée fonctionnellement à une obsession ; (6) la compulsion cognitive non liée fonctionnellement à une obsession ; (7) la compulsion (comportementale ou cognitive) intentionnelle, liée fonctionnellement à une obsession ; (8) l'obsession isolée. Le gradient de la capacité de reconnaissance du caractère égo-dystonique des obsessions et des compulsions va de l'absence de reconnaissance à l'affirmation sans équivoque.
 
Certaines observations d'affections neurologiques, d'inter-ventions neurochirurgicales et les études d'imagerie fonctionnelle du cerveau de patients ayant un SGT ou un TOC suggèrent l'implication d'un dysfonctionnement des noyaux gris centraux (NGC), du cortex préfrontal et à un moindre degré du système limbique dans le déterminisme des tics, des obsessions et des compulsions. Une pathologie du striatum provoquerait un SGT ou un TOC selon les régions concernées du striatum qui, au delà d'un seuil critique, deviennent déficientes et ne peuvent plus compenser le système. Un tic moteur simple impliquerait une pathologie par dépassement du seuil critique du putamen (en interaction avec le cortex moteur primaire). Une obsession pure, une pathologie de la partie ventro-médiane du noyau caudé et du noyau accumbens (en interaction avec le cortex cérébral et le système limbique). L'association de compulsions impliquerait une déficience de la partie dorso-latérale du noyau caudé (en interaction avec le cortex associatif). La co-occurence d'un SGT et d'un TOC impliquerait le putamen et le noyau caudé.
 
On peut schématiser un modèle neuronal impliquant principalement la "boucle motrice" (cortex prémoteur, moteur, sensoriel - putamen - pallidum - thalamus - aire motrice supplémentaire) qui pourrait être proposé pour les tocs comme pour les tics, mouvements plus anormaux par leur déclenchement et leur répétition irrésistible et incontrôlable, que dans leur réalisation motrice (un tic est un "simulacre de geste"). De même la compulsion, séquence de comportement organisé (rituel), et l'obsession, dont les thèmes ne diffèrent pas des pensées, des idées, des images ou des représentations mentales de tout un chacun, ont pour caractéristiques d'être, une fois, l'évènement déclenché, irrésistibles, répétitives, incontrôlables.
 
C'est à la fin des années 70 que les chercheurs mirent en lumière la fréquence des formes familiales et que l'analyse du mode de transmission suggéra le caractère autosomique dominant. Les études familiales indiquèrent que cette pathologie pouvait avoir une expression clinique variable, incluant des variantes bénignes, comme les tics moteurs ou vocaux chroniques, et les tics transitoires. Il existe en outre des preuves récentes que certains troubles comportementaux, incluant les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) et les troubles hyperactifs avec déficit attentionnel (« Attention deficit hyperactivity disorder » = ADHD ou syndrome deWeinberg), pourraient être des expressions particulières du SGT. Enfin, une hypothèse récente suggère d'inclure le SGT dans un cadre nosologique plus large des pathologies auto-immunes associées à des infections streptococciques, analogues à la chorée de Sydenham (« Pediatric autoimmune neuropsychiatrie disorder associated with streptococcal infection » =PANDAS).
 
Textes élaborés à partir des publications du Prof Dugas (hôpital R Debré, Paris et Leckman JF, Walker DE, Cohen DJ Premonitory urges in Tourette'syndrome . Am J Psychiatry 1993, 150, 98-102
 
Voir une observation de bâillements complusifs dans
Chouinard S, Ford B Adult onset tic disorders J Neurol Neurosurg Psychiatry 2000; 68; 738-743
 
GE Gilles de la Tourette La maladie des tics convulsifs La Semaine Médicale 1899; vol 19; p153-156 (pdf)
 
la lettre du site N° 17 du 1 mars 2003
la lettre du site N° 18 du 1 avril 2003
 
A Cursing Brain? The histories of Tourette Syndrome. Kushner HI 1999 
Neural correlates of self-face recognition Platek S et al.
Air swallowing as a tic Weila RS et al.
Panic, suffocation false alarms, separation anxiety and endogenous opioids Preter M, Klein DF