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Biographies de neurologues
 
Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier 
 
 
 

mise à jour du
 14 janvier 2007
Delahaye A Ed
1865
Traité des maladies mentales
Wilhelm Griesinger
1817-1868

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w. griesenger
 
OBS. XVI. - Démonomanie chronique. -p286
 
Une paysanne, c. s..., âgée de quarante-huit ans, non mariée, vint se présenter d'elle-même à la clinique, parce qu'elle était possédée par des esprits. Son père a été un peu fou étant déjà à un certain âge; sa soeur et son neveu sont aliénés. La malade a en un enfant à dix-neuf ans, elle l'a nourri pendant trois ans, et elle est tombée alors dans un état d'anémie profonde avec des douleurs étendues dans les membres et quelquefois des convulsions; pendant longtemps elle eut un bâillement convulsif dans la bouche.
 
Trois ans après le premier début de la maladie (il y a treize ans environ, par conséquent), la femme commença à entendre parler en elle. A dater de ce moment, il lui vint des pensées, et elle dit des mots qu'elle n'avait pas l'intention de dire et qu'elle exprima bientôt avec une voix qui différait de sa voix ordinaire.
 
D'abord ce sembla être des observations non pas opposantes, mais indifférentes ou même raisonnables, qui accompagnaient la pensée et la parole de la malade. Par exemple, cette voix lui disait : « Va chez le docteur, va chez le prêtre! » ou bien « Tu dois faire cela! » Peu à peu à ces observations indifférentes il s'en ajouta de nouvelles, d'un caractère plus négatif, et actuellement tantôt cette voix constate simplement ce que la malade vient de dire, ou bien elle commente ses paroles, ou bien elle les lui reproche et les tourne en ridicule.
 
Par exemple, quand la malade a dit quelque chose de juste, la voix lui dit « Tu en as menti! tu ne dois pas le faire savoir! » - Le ton de cette voix, quand « l'esprit » parle, diffère toujours un peu et quelquefois même totalement de la voix ordinaire de la malade; et ce qui fait surtout que la malade croit à la réalité de cet « esprit », c'est qu'il a une autre voix qu'elle. Souvent cet esprit commence par parler avec une voix basse et grave, puis cette voix monte ou descend plus haut ou plus bas que la voix ordinaire de la malade; de temps à autre, elle pousse un cri plus aigu, plus perçant, suivi d'un rire sec et ironique. - J'ai observé souvent ce fait moi-même. - en outre de ces mots que l'esprit prononce en elle, la malade entend intérieurement et d'une façon presque incessante, un très grand nombre d'esprits qui parlent; parfois elle a des hallucinations complètes de l'ouïe, jamais elle n'a d'hallucinations de la vue.
 
La prière exagère cet état que nous venons de décrire, et augmente son agitation; mais à l'église, comme elle a peur du monde et du prêtre, elle peut retenir « la voix de l'esprit »; elle pouvait même lire des prières à haute voix sans se troubler. De temps à autre ses discours ont une teinte de nymphomanie; elle dit que les esprits lui font naître des pensées obscènes et les lui font exprimer; la malade souffre d'un prurit de la vulve. - Elle ne sait pas, avant que l'esprit ait parlé, ce qu'il va dire. Quelquefois la parole lui manque tout à coup pour un certain temps.
 
Dans tous les phénomènes que nous venons d'énumérer, il règne une uniformité extrême, invariable, et cet état, devenu depuis longtemps fixe et stationnaire, est toujours resté le même pendant la durée du traitement. (Observation de l'auteur.)
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