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mise à jour du 30 mai 2002
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 A propos d'un nouveau neuromédiateur, l'hypocrétine.
Sa place dans la neurophysiologie du sommeil,
du bâillement et de l'appétit
 
A brief history of hypocretin/orexin and narcolepsy
Cortical arousal induced by microinjection of orexins into the paraventricular nucleus of the rat
The neurobiology of sleep: genetics, cellular physiology and subcortical networks
Hypocrétine (orexine) et narcolepsie : dormir ou dîner
E Mignot
Chat-logomini
Il est réconfortant de penser qu'on ait récemment, en 1998, découvert un nouveau neuromédiateur et d'imaginer qu'il en reste d'autres à découvrir pour éclairer les fonctionnements inexpliqués de notre cerveau. Voir une mise au point de JG Sutcliffe et L de Lecea - the hypocretins : setting the arousal threshold, Nature Neuroscience vol 3, mai 2002, p339-349. Voir l'illustration : Schematic model of neurotransmitter circuits that are involved in the three states of vigilance.

En 1998, deux groupes de chercheurs, sans lien entre eux, découvrent simultanément le même neuropeptide, baptisé "hypocretins" par de Lecea L (2) et "orexins" par Sakurai (12-15). Le plus étonnant reste la découverte en elle-même, car les cellules sécrétrices, peu nombreuses, sont localisées dans une infime partie de l'hypothalamus latéral. Les premières observations ont montré un rôle dans la stimulation de la satiété, d'où son appellation orexin (injections dans les ventricules cérébraux du cerveau de rats (3,4,6)).

La découverte, en 1999, que la narcolepsie (1,5) canine était due à une mutation d'un gêne codant pour un des récepteurs à l'hypcretin (Hcrt2), a encouragé d'étendre les recherches du contrôle de l'appétit à la régulation du sommeil. Il apparut rapidement que l'absence d'hypocrétine chez la souris avait d'importants effets sur le comportement et le sommeil rappelant la narcolepsie ou maladie de Gélineau (7,10).

D'autres études indiquèrent les importantes projections des cellules hypophysaires sécrétrices d'hypocrétine vers toutes les cellules monoaminergiques, et l'effet de stimulation de l'éveil ainsi engendré (3).

Des mesures récentes ont indiqué que les patients atteints de narcolepsie avaient des taux effondrés d'hypocrétine dans le système nerveux central. A l'heure présente, il semble que la principale cause de la narcolepsie soit une destruction par auto-immunité des cellules hypophysaires sécrétrices. Les gênes déterminant l'apparition des récepteurs à l'hypocrétinee sont identifiés, ainsi que deux types de petides actifs sur deux types de récepteurs (10,11).

La neuroanatomie montre que les cellules hypothalamiques sécrétrices projettent sur tout le cortex, le tronc cérébral, le système limbique, le thalamus, et vers la moelle épinière. Des projections denses et monosynaptiques vers le locus coeruleus (3,8) indiquent l'importance de ce peptide dans la régulation de l'éveil. Autre constat crucial, la répartition des deux types de récepteurs à l'hypocrétinee ont des distributions anatomiques différentes : le locus coeruleus noradrénergique est couplé de façon dense avec le type Hcrt1 et ne contient pas de Hcrt2; le nucleus tubero-mammillaire histaminergique contient exclusivement des Hcrt2. L'effet semble essentiellement excitateur, surtout au niveau du locus coeruleus, des noyaux du raphé, de la substantia nigra, des noyaux tubero-mammillaires (10,11,13)

La différence d'expression de Hctr1 et Hctr2 peut expliquer le rôle primordial de Hctr2 dans la narcolepsie. Chez l'animal, la destruction des récepteurs Hctr2 engendre un tableau de blocage d'activité motrice comparabale à la cataplexie et des accès de sommeil paradoxal. D'autre part, des animaux porteurs de mutations de Hctr1 ont des perturbations de leur sommeil lent profond sans cataplexie (7,10,11,13)

Il n'existe à ce jour aucune donnée répertoriée étudiant le bâillement dans la narcolepsie. La place de l'hypocrétine dans la neurophysiologie du bâillement commence à apparaitre expérimentalement chez le rat : l'injection d'hypocrétine1 dans le noyau parventriculaire de l'hypothalamus déclenche des bâillements en stimulant la vigilance. L'hypocrétine 2 stimule la vigilance sans déclencher de bâillements : voir Sato-Suzuki I, H Arita Cortical arousal induced by microinjection of orexins into the paraventricular nucleus of the rat .

L'effet orexigène de l'hypocrétine, avec un rythme circadien confirmé, semble jouer un rôle central dans la régulation homéostasique de l'apport alimentaire (2,12). L'obésité est associée à une réduction d'activité, un excès de somnolence mais aucune donnée actuelle ne permet d'attribuer à un déficit d'hypocrétine une cause à certaines obèsités. L'injection intraventriculaire cérébrale d'hypocrétine chez l'animal (6), potentialise la stimulation adrénergique avec libération de cortisol, réduction de la prolactine et de l'hormone de croissance. Chez l'homme la prolactine et l'hormone de croissance sont au plus bas pendant le sommeil; le cortisol ne varie pas au cours de la narcolepsie (7).

En général, les carnivores bâillent plus que les herbivores, comme les variations du niveau de leur vigilance le laissent prédire (Baenninger). En effet, le rythme de vie des carnivores est caractérisé par d'importantes variations du niveau de vigilance, depuis la tranquilité somnolente, à la marche, la course après une proie, la chasse, le dépeçage. Au contraire, la vie des herbivores est relativement monotone, et ils passent la plupart de leur temps à brouter; la difficulté à fabriquer des protéines à partie de l'herbe obligent ces mammifères à passer beaucoup plus de temps de leur éveil à en ingérer. On peur supposer ici un rôle régulateur de l'hypocrétine sur le sommeil et l'homéostasie énergétique et donc sur la fréquence des bâillements.

Les observations de patholologie humaine montrent le bâillement par excès comme signe sémiologique d'une éventuelle pathologie hypophysaire. Par exemple, l'acromégalie, excès de fabricaton d'hormone de croissance, se révèle par des troubles osseux classiques mais aussi par une asthénie, une somnolence associée à des bâillements répétés. L'adénome hypophysaire peut comprimer les cellules sécrétrices d'hypocrétinee, perturber leur sécrétion; l'augmentation d'hormone de croissance circulante peut engendrer un rétrocontrôle négatif sur la sécrétion de d'hypocrétinee. Tout reste à découvrir.

Les très intenses interactions de l'hypocrétinee avec le système aminergique tant moléculaire que cellulaire lui font jouer un rôle dans la régulation de l'éveil. Comment ne pas penser que l'hypocrétinee a sa place dans la neurophysiologie du bâillement ?

hypocretine

Références (cliquez ici pour lire les résumés de tous ces articles)
  1. Chemelli R M, JT Willie et al. (1999). "Narcolepsy in orexin knockout mice: molecular genetics of sleep regulation." Cell 98(4): 437-51.
  2. de Lecea L, TS Kilduff et al. (1998). "The hypocretins: hypothalamus-specific peptides with neuroexcitatory activity." Proc Natl Acad Sci U S A 95(1): 322-7.
  3. Hagan J J, R A Leslie et al. (1999). "Orexin A activates locus coeruleus cell firing and increases arousal in the rat." Proc Natl Acad Sci U S A 96(19): 10911-6.
  4. Hakansson M, L de Lecea et al. (1999). "Leptin receptor- and STAT3-immunoreactivities in hypocretin/orexin neurones of the lateral hypothalamus." J Neuroendocrinol 11(8): 653-63.
  5. Lin L, J. Faraco et al. (1999). "The sleep disorder canine narcolepsy is caused by a mutation in the hypocretin (orexin) receptor 2 gene." Cell 98(3): 365-76.
  6. Lubkin M and A Stricker-Krongrad (1998). "Independent feeding and metabolic actions of orexins in mice." Biochem Biophys Res Commun 253(2): 241-5.
  7. Mignot E. (2001). "A commentary on the neurobiology of the hypocretine/orexin system." Neuropsychopharmacology 25 (5 Suppl): S5-13
  8. Moore R Y, E A Abrahamson et al. (2001). "The hypocretin neuron system: an arousal system in the human brain." Arch Ital Biol 139(3): 195-205.
  9. Nishino S, B Ripley et al. (2000). "Hypocretin (orexin) deficiency in human narcolepsy." Lancet 355(9197): 39-40.
  10. Overeem S, E Mignot et al. (2001). "Narcolepsy: clinical features, new pathophysiologic insights, and future perspectives." J Clin Neurophysiol 18(2): 78-105.
  11. Peyron C, J Faraco et al. (2000). "A mutation in a case of early onset narcolepsy and a generalized absence of hypocretin peptides in human narcoleptic brains." Nat Med 6(9): 991-7.
  12. Sakurai T, A Amemiya et al. (1998). "Orexins and orexin receptors: a family of hypothalamic neuropeptides and G protein-coupled receptors that regulate feeding behavior." Cell 92(4): 573-85.
  13. Salin-Pascual R, D Gerashchenko et al. (2001). "Hypothalamic regulation of sleep." Neuropsychopharmacology 25(5 Suppl): S21-7 (intégral article pdf)
  14. Sato-Suzuki I, I Kita, et al. (2002). "Cortical arousal induced by microinjection of orexins into the paraventricular nucleus of the rat." Behav Brain Res 128(2): 169-77.(intégral article pdf)
  15. Siegel JM. A brief history of hypocretin/orexin and narcolepsy (version intégrale pdf à télécharger)