mystery of yawning
Le bâillement, du réflexe à la pathologie
Le bâillement : de l'éthologie à la médecine clinique
Le bâillement : phylogenèse, éthologie, nosogénie
 Le bâillement : un comportement universel
La parakinésie brachiale oscitante
Yawning: its cycle, its role
Warum gähnen wir ?
 
Fetal yawning assessed by 3D and 4D sonography
Le bâillement foetal
Le bâillement, du réflexe à la pathologie
Le bâillement : de l'éthologie à la médecine clinique
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La parakinésie brachiale oscitante
Yawning: its cycle, its role
Warum gähnen wir ?
 
Fetal yawning assessed by 3D and 4D sonography
Le bâillement foetal
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Biographies de neurologues
 
Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier 
 
 
 

mise à jour du
8 novembre 2012
 
European Neurology
2013;69(4):226&endash;228
 
PDF
Louise Augustine Gleizes
(1861- ?)
 
Olivier Walusinski
 
Augustine, un film d'Alice Winocour pdf
2013 European Neurology pdf

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A l'occasion de la sortie, le 7 novembre 2012, du film « Augustine » réalisée par Alice Winocour, avec Vincent Lindon dans le rôle de Charcot (on l'aurait mieux vu en Georges Gilles de la Tourette) et Stéphanie Sokolinski en Augustine, il semble intéressant de donner une perspective historique, non romancée, de la maladie dont elle souffrait en donnant la transcription complète de l'observation recueillie par Désiré-Magloire Bourneville.  
 
Léon Daudet (1867-1942) dépeint, en 1922, le célèbre tableau d'André Brouillet (1857-1904) « Une leçon clinique à La Salpêtrière »: « Un tableau célèbre a popularisé ces séances de La Salpêtrière, dont tout Paris s'entretenait il y a 35 ans et auxquelles assistaient, mêlés aux médecins, des écrivains, des artistes des hommes politiques; car l'hystérie et les localisations cérébrales faisaient partie du programme laïque et républicain ». Brouillet célèbre la gloire de Jean-Martin Charcot (1825-1893) mais immortalise aussi sa plus célèbre patiente hystérique Marie Wittmann, surnommée Blanche (1859-1913).
 
Paul Richer (1849-1933) explique dans l'introduction de sa thèse: « Lorsqu'en 1878, j'eus l'honneur de terminer mon internat sous sa direction, M. Charcot arrivait à cette conception de la grand attaque d'hystérie divisée en quatre périodes, conception si simple qu'on s'étonne de ne l'avoir point trouvée depuis longtemps, et si féconde qu'elle éclaire l'histoire toute entière de la grande névrose ». Ces quatre périodes se succèdent ainsi:
 
- Phase « épileptoïde avec tétanisation brusque des muscles de tout le corps », convulsions cloniques, enfin résolution ;
- Phase « des attitudes illogiques ou contorsions et de grands mouvements » allant jusqu'à l'opisthotonos, à laquelle Charcot donna le nom de clownisme;
- Phase « des attitudes passionnelles ou des poses plastiques » (catalepsie) pendant laquelle la malade est sujette à « des hallucinations qui la ravissent ».
-Phase finale, « l'attaque est terminée, la connaissance revenue, mais en partie seulement et pendant un certain temps la malade demeure en proie à un délire ».
 
blanche wittmannaugustine gleizes
 
Blanche Wittmann (1859-1913)                                   Augustine Gleizes (1861- ?)
 
 
Relatant la troisième phase, Richer précise que « Gl... est celle de nos malades chez laquelle ces poses plastiques ou attitudes passionnelles ont le plus de régularité. Elles retracent principalement deux événements de son existence. Le premier, terrible, marque son entrée dans la vie; elle avait dix ans quand elle en fut victime. Le second, au contraire, lui cause un plaisir qu'elle ne cherche pas à dissimuler ». Gl est Louise Augustine Gleizes, née le 21 août 1861, une des hystériques de La Salpêtrière où elle est admise le 21 octobre 1875. Moins connue que Blanche, sa jeunesse, la blancheur de sa peau, l'expressivité de son visage, la théâtralité de ses accès, en font la plus photographiée par Paul Regnard (1850-1927); « l'appareil photo l'aime » dit-on à cette époque où la technique vient d'apparaître.
 
Sa mère la conduit à L'Hôpital des Enfants Malades à Paris après 5 mois d'évolution de crises épileptiques. Après une amélioration transitoire, la récidive l'amène devant le Pr. Charcot qui l'admet dans son service le 21 octobre 1875 alors qu'elle n'a que 14 ans. Son histoire clinique nous est contée par Désiré-Magloire Bourneville (1840-1909) dans le tome 2 de l'Iconographie Photographique de La Salpêtrière, paru en 1878:
 
« Louise Augustine est entrée à la Salpetrière (service de M. CHARCOT), le 21 octobre 1875, à l'âge de 15 ans et demi.
 
Renseignements fournis par sa mère. (2 novembre 1875). Père, âgé de 45 ans, domestique, sobre, sujet à des céphalalgies; il est en convalescence d'une pleurésie. [Son père aurait eu une paralysie. - Aucun autre accident nerveux dans la famille.]
 
Mère, 41 ans, domestique, bien portante; étant jeune, elle a eu des migraines qui l'obligeaient à se coucher; elles ont disparu quand elle s'est mariée. [Père, meulier, mort de la poitrine; il faisait des excès de boisson. - Mère, bonne santé. - Rien chez les autres parents]. Pas de consanguinité.
 
suite observation à lire sur pdf
 
Regnard nous donne une photographie d'Augustine, « à l'état normal », avec un discret sourire, dans une pose « n'ayant plus rien des manières de l'enfant, elle a presque l'air d'une femme faite » comme le précise Bourneville. Si Blanche présentait des crises d'une remarquable régularité comme « une mécanique de précision », Augustine montrait de grande variabilité dans le déroulement de ses accès. Par exemple, « une des patientes de notre service (cf Augustine) affligée d'hystéro-épilepsie, a développé une pathologie rare, méritant qu'elle soit offerte à votre regard. Elle est par nature instable et mobile, comme le sexe qu'elle touche préférentiellement ». Par cette remarque qui nous paraît sexiste, Charcot use d'un oxymore pour décrire Augustine, atteinte « d'une chorée rythmique » (Leçon de novembre 1877). Alors que les crises épileptoïdes d'Augustine sont sans particularité et cessent par la compression ovarienne, la période de « ses attitudes passionnelles » et de ses hallucinations donne aux photos de l'Iconographie un cachet quasi érotique qui ont bâti sa célébrité. La blancheur de la chemise, découvrant largement le décolleté et les cuisses, ajoutent aux poses corporelles et au sourire, pouvant donner au lecteur une impression d'être un voyeur malgré lui.
 
augustine gleizesaugustine gleizes
              Augustine- plaque photo de La Salpêtrière - Attitude passionnelle - Phase gaie - Gravure par Paul Richer
 
Cette pauvre Augustine placée en nourrice très tôt, puis en pension religieuse, connaît dès le plus jeune âge des châtiments corporels. Victime d'attouchements à 10 ans, elle est violée à 13. C'est cette scène première qu'Augustine rejoue, symbolise pour convertir l'attentat sexuel. Bien que répétant son malheur, Charcot y semble insensible en public, n'apportant son attention qu'aux symptômes. Sigmund Freud (1856-1939) rapporte une anecdote dont il fut témoin et qui, pourtant, témoigne de la parfaite perspicacité de Charcot quand aux mécanismes déclencheurs et à leur spécificité. Charcot susurre à l'oreille de son collègue Paul Brouardel (1837-1906): « mais, dans des cas pareils, c'est toujours la chose génitale, toujours... toujours... toujours... » Et Freud raconte: « Ce disant il croisa les bras sur sa poitrine et se mit à sautiller avec sa vivacité habituelle. Je me rappelle être resté stupéfait pendant quelques instants et, revenu à moi, m'être posé la question: Puisqu'il le sait, pourquoi ne le dit-il jamais ?...» (Freud, 1923). Il ne l'a jamais dit, parce que sa volonté de savoir, qui était volonté d'avoir sous l'oeil quelques définitives « régularités plastiques », sa volonté de savoir fut peut-être aussi volonté d'évitement, comme le propose Georges Didi-Huberman.
 
Il est clair que Charcot, fin observateur, s'intéressait au corps, à l'image alors que Freud s'intéressera à la parole. Pour Augustine, c'est Bourneville qui écoute avec empathie et affection, longuement, et transcrit précisément ses hallucinations, sans négliger ses rêves, décrivant en détails tous ses traumatismes psychiques. L'intérêt qu'il portait à l'enfance, ses idées politiques progressistes ne sont sûrement pas étrangères à son attitude bienveillante. Bien qu'il n'élabore pas une explication détaillée, sa phrase « Le délire hystérique a trait, en définitive, aux différents événements qui ont marqué la vie de L... » montre qu'il a parfaitement saisi que les traumatismes de l'enfance expliquent « la conversion » qu'est l'hystérie. Mais notons qu'en 1875, Charcot est encore à la recherche d'une cause organique, anatomo-pathologique, à l'hystérie et le modèle psychogénique de l'hystérie ne lui apparaîtra que dix ans plus tard, et 20 ans avant les écrits de Freud.
 
augustine gleizes
Augustine - Léthargie Planche XIV
 
Bourneville compte 1 296 attaques d'hystérie en 1877. En décembre 1878, les crises disparaissent sans qu'on sache pourquoi. Augustine quitte le service le 18 février 1879. Elle continue à vivre à La Salpêtrière, employée comme femme de service, gagnant 15 francs par mois, pendant les seize mois suivants. Bien qu'elle semble rétablie, Charcot l'appelle périodiquement pour une démonstration d'hypnotisme. C'est pourquoi, le tome 3 de l'Iconographie, paru en 1880, contient ses photos, en tablier blanc, indiquant son statut de soignante, comme l'illustre la célèbre photo « en léthargie: contractures artificielles ». Modèle de cataplexie, elle devient « pliable » ou « arcboutée », tenant à l'horizontal, ne reposant que sur la nuque et les tendons d'Achille, de façon phénoménale à peine croyable. Comme Blanche, Augustine apprécie les inhalations d'éther qui lui provoquent une euphorie avec pensées érotiques centrées sur son amoureux dont elle refuse d'indiquer l'identité à Bourneville. Il la presse de raconter ces épisodes et en fait un récit paru dans le tome 3 de l'Iconographie.
 
Augustine finit par se rebeller contre son statut de « vedette » et s'échappe de La Salpêtrière. Peu après, on retrouve sa trace dans le livre des admissions de l'Hôpital de la Charité où elle reste six jours pour « un phlegmon du ligament large». On y lit son adresse: 19 rue Sommerard dans le Vè arrondissement de Paris. Plus aucune information n'est disponible après sa sortie et la date de son décès est inconnue.
 
Bien malgré elle, Augustine revit en 1928 dans le célèbre manifeste: « Le cinquantenaire de l'hystérie » de Louis Aragon (1897-1982) et André Breton (1896-1966): «  Nous, surréalistes, tenons à célébrer ici le cinquantenaire de l'hystérie, la plus grande découverte poétique de la fin du XIXè siècle, et cela au moment même où le démembrement du concept de l'hystérie paraît chose consommée. Nous qui n'aimons rien tant que ces jeunes hystériques dont le type parfait nous est fourni par l'observation relative à l'aide de la délicieuse X. L. (Augustine) entrée à la Salpêtrière dans le service du docteur Charcot le 21 octobre 1875, à l'âge de 15 ans et 1/2, comment serions-nous touchés par la laborieuse réfutation de troubles organiques dont le procès ne sera jamais qu'aux yeux des seuls médecins celui de l'hystérie ? (...) L'hystérie est un état mental plus ou moins irréductible se caractérisant par la subversion des rapports qui s'établissent entre le sujet et le monde moral duquel il croit pratiquement relever, en dehors de tout système délirant. Cet état mental est fondé sur le besoin d'une séduction réciproque qui explique les miracles activement acceptés de la suggestion médicale (ou contre-suggestion). L'hystérie n'est pas un phénomène pathologique il pleut à tous égards être considéré comme un moyen suprême d'expression ».
 
compresseur ovaires
 
Outre de multiples livres que son cas a inspirés, Jean-Claude Monod et Jean-Christophe Valtat ont reconstitué sa brève histoire dans leur film « Augustine: quand Charcot exhibait l'hystérie » sorti en 2003 (avec pour acteurs Maud Forget, François Chattot, Sébastien Ossard ). (Sans oublier, l'évocation de Charcot, Blanche et Augustine dans le film de John Huston, "Freud, the Secret Passion" en 1962).
 
charcot Brouillet Salpetriere
 
Références
 
Aragon L, Breton A. Le cinquantenaire de l'hystérie (1878-1928). La Révolution Surréaliste. 1928;(11):20-22.
 
Bourneville DM, Regnard P. Iconographie photographique de la Salpêtrière: service de M. Charcot. Paris. Aux Bureaux du Progrès Médical. A. Delahaye. 1876-1880. 3 vol.
 
Breuer von J, Freud S. Studien über Hysterie. Leipzig. F. Deuticke. 1895.
 
Charcot JM. De la chorée rythmique hystérique. Le Progrès Médical. 9 février 1878;6(58).
 
Charcot JM. De la chorée rythmique hystérique. Oeuvres complètes. T1, 14è leçon. p 393. Paris. Aux Bureaux du Progrès Médical. A. Delahaye & E. Lecrosnier. 1884.
 
Charcot JM, Richer P. Description de la grande attaque hystérique. Le Progrès Médical. 1879;7(2):18-20.
 
Didi-Huberman G. Invention de l'hystérie: Charcot et l'iconographie photographique de la Salpêtrière. Paris. Macula. 1984. 304p.
 
Freud S. Cinq leçons sur la psychanalyse. Paris. Payot. 1923. 123p.
 
Hustvedt A. Medical Muses: Hysteria in Nineteenth-century Paris. London. Paris. New-York. Bloomsbury. 2011. 372p.
 
Richer P. Etudes cliniques sur l'hystéro-épilepsie ou grande hystérie. Paris. A. Delahaye & E. Lecrosnier. 1881. 736p.

Louise Augustine Gleizes (1861- ?)
 
La création artistique est par essence l'image de la liberté et de l'imagination. Cette liberté permet-elle de trahir des faits historiques, les travaux de recherches sur l'hystérie par Jean-Martin Charcot (1825-1893) à l'hôpital de La Salpêtrière, afin de défendre implicitement la cause féministe ? C'est l'option choisie par Alice Winocour, pour son premier film « Augustine », sorti à Paris le 7 novembre 2012. Augustine est, en réalité, Louise Augustine Gleizes, née le 21 août 1861, une des hystériques de La Salpêtrière où elle est admise le 21 octobre 1875, à 14 ans (et non 19 comme dans le film)......
 
Louise Augustine Gleizes, une biographie
 
augustine winocour
 
Louise Augustine Gleizes (1861- ?)
 
Artistic creation is, by its essence, the image of liberty and imagination. Does this liberty give the license to betray historical facts concerning hysteria research conducted by Jean-Martin Charcot (1825-1893) at La Salpêtrière Hospital, in order to implicitly defend the feminist cause? This is the option chosen by Alice Winocour for her first film "Augustine", which was released in Paris on the 7th of November 2012.......