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Biographies de neurologues
 
Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier 
 
 
 

mise à jour du
 22 octobre 2006
Masson
1896
Le sommeil tiers de notre vie
Pathologie, physiologie, hygiène, psychologie
Marie Manaseina
Traduit de russe par E. Jauber

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Chacun sait que nous bâillons fréquemment, chaque fois que nous nous ennuyons, ou que nous avons sommeil. On se demande alors qu'est ce qu'un bâillement? Extérieurement, le bâillement consiste en une inspiration profonde et lente, avec la bouche plus ou moins largement ouverte, et qui est suivie d'une expiration lente qui s'accomplit. La bouche béante et la glotte légèrement contractée, de sorte qu'en résultat il se produit ce son si connu de tout le monde, qui accompagne chaque bâillement régulier. C'est là le côté extérieur d'un bâillement. Quant à son mécanisme intérieur, il provient, d'après le physiologiste italien Mosso, d'une fatigue de l'attention.
 
Cette explication du professeur Mosso est corroborée par ce fait bien connu, que les bâillements apparaissent, ceteris paribus, le plus souvent chez les malades qui ont été affaiblis par une perte considérable de sang et aussi chez des sujets â système nerveux instable, par exemple chez des hystériques. En un mot, les bâillements apparaissent d'autant plus facilement, que la vie intellectuelle consciente se montre plus faible et plus promptement fatiguée; ce qui est le cas des anémiques. Beaucoup de personnes souffrant de l'anémie se mettent à bâiller et à somnoler chaque fois qu'elles restent quelque temps dans une position verticale, c'est-à-dire assises ou debout; et au contraire, dès qu'elles prennent une position horizontale, leur envie de dormir et leurs bâillements disparaissent sans laisser de trace. En présence de tous ces faits, ii est logique de supposer qu'il doit exister une liaison plus ou moins intime entre les bâillements et l'anémie du cerveau.
 
Des bâillements énergiques s'accompagnent toujours de pandiculations de tout le corps et des membres, et le professeur Mosso dit qu'elles proviennent du désir instinctif d'éviter les stases localisees du sang, et qu'en géneral, on éprouve le besoin de se distendre les membres chaque fois que le sang se trouve distribué irrégulièrement dans le corps.
 
Que les bâillements, les pandiculations puissent en réalité provenir de la fatigue de l'attention, c'est ce que tendraient à confirmer mes expériences sur l'antagonisme existant entre I'attention d'un côté et tous les mouvements, et même toutes les innervations motrices de l'autre. Ces experiences ont été faites par moi en collaboration avec M. Le Dr Wartanoff, et au moyen de la méthode graphique. Elles m'ont démontré que toute activité de l'attention se traduisait extérieurement par un afflux du sang vers le cerveau et par un amoindrissement correspondant dans le volume du bras; mais si on obligeait les sujets exécuter quelques mouvements habituels, les effets de l'attention active sur les vaisseaux du corps ne se faisaient plus sentir. Il en allait de même lorsque les sujets, en même temps que leur atten tion se concentrait sur quelque sensation minime de l'ouïe ou du toucher, se représentaient un mouvement quelconque, sans toutefois le reproduire; c'est-à-dire que l'attention ne se traduisait pas alors par un amoindrissement dans le volume du bras.
 
Ces expériences m'ont prouvé définitivement qu'entre l'attention active et toutes sortes de mouvements ou d'innervations motrices, il existe un antagonisme complet et absolu, et par conséquent les bâillements et les pandiculations peuvent très bien être dus à la réaction motrice de l'organisme contre une attention trop prolongée, trop assidue. Pendant que l'attention est encore pleine de force, elle peut étouffer tous les mouvements, mais dès qu'elle est fatiguée, la réaction se montre et le besoin de mouvement se traduit par des baillements réitérés, par le désir d'étirer son corps, de tendre ses bras, etc. En somme, l'explication qu'a donnée te professeur Mosso du mécanisme intérieur ou de l'essence même du bâillement parait être tout fait vraie et juste.